AIR DU TEMPS

Copier-coller à Hollywood (3)

23 juillet 2013

Pour la conclusion de ce long article sur le "copier-coller à Hollywood", nous nous demandons ce qui fait qu’un film marque nos esprits et son époque ? La perfection technique ou autre chose, un regard, une sensibilité, une manière de voir et de montrer qui nous ouvre un véritable univers ?

Quand je pense aux films, animation et live action, qui ont marqué leur temps, qui ont laissé une empreinte visuelle forte, je crois qu’aucun n’avait vraiment été conçu par des professionnels aussi hyper-spécialisés qu’aujourd’hui. Aucun n’était une franchise, une suite, une adaptation de comic book. Et surtout, les artistes qui les avaient conçus avaient jusqu’alors travaillé dans d’autres domaines, pour la simple raison que ceux-là n’étaient pas encore si spécialisés. Ils avaient apporté une expérience inédite. Quand il dessine La Nuit sur le Mont Chauve et l’Ave Maria de Fantasia, l’illustrateur danois Kay Nielsen n’avait encore jamais travaillé pour le cinéma. Nous devons les mondes fabuleux de Star Wars à deux novices d’une quarantaine d’années, Ralph McQuarrie et John Mollo, l’un designer chez Boeing, l’autre célèbre historien du costume militaire. Le génie d’Alien tient à H.R. Giger, un peintre suisse. Celui de Blade Runner à Syd Mead, un designer industriel ayant notamment travaillé pour Philips. Ces films donnaient l’impression de sortir de leur cadre, d’être différents, au point qu’ils continuent d’être copiés, trente ans plus tard. Il n’y avait pas alors de films comme eux. Il est étonnant de penser que Fight Club, aux décors urbains sans exotisme, est sans doute plus spectaculaire et inventif qu’Avatar, gros fatras 3D de science-fiction. Le film de James Cameron a finalement peu à offrir de plus pour nos yeux que des décors, des vaisseaux, des créatures déjà vus plusieurs fois ailleurs. Alors certes, aucun film peut-être ne les avait combinés de cette manière ; mais cela semble peu pour un budget tournant dans les 300 millions de dollars.

Pour toute leur perfection technique, je suis convaincu qu’aucun de ces nouveaux spectacles ne laissera la moindre empreinte. Ce sont des films bien fabriqués, comme des grille-pains ou des T-Shirt bien conçus, mais ce ne sont en rien de grands films. Il leur manque sans doute une manière singulière de voir.

Armel Gaulme

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