La Corée des chamanes

26 mars 2012

Le seul point commun est la large place accordée à l’improvisation dans les deux cas, mais chez les musiciens coréens il s’agit d’un travail très sophistiqué, intellectuel même, qui symbolise bien la philosophie de leur pays, la nécessité de l’harmonie entre les hommes avec ce que cela suppose d’écoute profonde et de complicité travaillée. Le sinawi, cette improvisation musicale d’inspiration chamanique, est une bonne façon de comprendre les Coréens, à la fois disciplinés et libres. Les invasions qu’ils ont subies ont façonné cet esprit qui sait s’adapter tout en gardant son fond inaltérable.

Il faut aimer les sons inusités, les rencontres inattendues entre les voix et les instruments pour apprécier ce chaos finement organisé. Bien qu’ici la dimension religieuse soit remplacée par le professionnalisme des musiciens, le rythme peut entrainer vers des voyages intérieurs inconnus.

En dehors de pièces musicales à plusieurs, nous avons beaucoup aimé les solos, sans doute plus faciles à appréhender pour une oreille occidentale, comme celui de Kim Young-Gil à la cithare à archet, ajaeng, des sons inusités avec un instrument d’un totale beauté et d’une complexité absolue. S’il a commencé sa formation assez tard, avec un maître, il explique que le sinawi a toujours baigné sa vie quotidienne, surtout quand on est un petit garçon de l’ïle de Jindo, terre d’élection des traditions populaires et chamaniques.

Autres émerveillements, la cithare à douze cordes pincées, gayageum, de Kim Hae-Sook dans sa grande jupe posée sur le sol comme la corolle d’une fleur bleu nuit ; la simplicité du tambour sablier, janggu, de Yoon Ho-Se et la voix de Yu Mi-Ri, une des meilleures chanteuses de sa génération.

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