65 Râââh ! Hommage à Gotlib

5 juillet 2011

“Je te prendrai de gré ou de force !”
“Inutile de résister, voilà pour toi !”
“Prends-la, esclave ! Et par derrière !”
“Râââh !”
etc...

Jean-Charles ne prenait que par derrière et Beaudoin se demanda si le physique très particulier de Lucile y était pour quelque chose : il n’avait jamais vu de fesses pareilles, une telle masse ne se voyait que dans le Satyricon de Fellini.
“Epargne-moi maitresse ! Je suis à toi.”
“Punis-moi si tu le désires, voici ton fouet.”
“Qu’on l’attache !”
“Râââh !”


Les scènes qui s’enchainaient d’une semaine à l’autre avaient un pouvoir hypnotique puissant et, malgré quelques facéties comme Louis Lannois léchant Lucile avec seulement sa jaquette d’académicien, son crâne dégarni et sa nuque congestionnée disparaissant entre les replis blêmes de ses cuisses phénoménales, il fut heureux que l’on vienne lui annoncer l’arrivée de Alex.

Son sourire poli ne le rassura qu’à moitié. Elle était assise dans le fauteuil de moleskine qui faisait face au bureau de Vogel, les mains croisées sur ses genoux gainés de noir. Elle portait un tailleur à jupe courte et il eut un mal fou à détacher son regard de l’endroit où le collant disparaissait sous l’ourlet.
Elle le toisa sans douceur :
“En quoi puis-je vous aider, inspecteur ?”
En disparaissant sous un tchador ? En m’entrainant vers la banquette la plus proche ?
“Connaissez-vous un certain Jean-Charles Balinaud ?”
Elle haussa les sourcils, soudain amusée.
“Charlotte ? Mon Dieu oui, comme tout le monde chez Saunders. Charlotte et sa moumoutte. Charlotte et ses mollets épilés. Charlotte, le chef de la rubrique "Nos actions sont les vôtres" ou le contraire. Grand économiste devant l’éternel. Une valeur sûre du groupe, toujours fourré avec des grands patrons, des boursicoteurs. Grand amateur de voyage de presse en première classe et d’hôtels cinq étoiles. Accessoirement papa d’un petit Philou...”
“Filou ?”
“Philou, Philippe quoi ! Une petite bestiole qui est là parce que Papa l’y a mis et qui s’occupe du marché de l’art. C’est en couchant avec Philou que Vanessa Schmidt a été intégrée ce qui prouve que les vieilles recettes marchent toujours !”

Beaudoin la contempla, stupéfait par ce déluge d’informations contradictoires et hasarda :
“Vous êtes sûre pour "Charlotte" ?”
“Que quoi ? Que l’honorable Balinaud est un homme à homme ? Disons qu’il marche à voile et à vapeur. Le pauvre Philou est suffisamment traumatisé d’avoir dû supporter depuis son enfance oncle Henri, Marcel ou Maurice à la maison !”
“Il fait ça ?”
“Il le faisait. Maintenant, je ne sais pas. Notre Philou est devenu un homme ! Franchement, je n’ai aucun rapport avec lui : les pervers ne me tentent pas trop et il est dans un autre escalier que moi, une autre rédaction, un autre monde quoi ! Je connais mieux son fils, plus paumé que méchant mais bien tortueux quand même. Pas vraiment mon style non plus.”
Il eut l’envie soudaine de lui demander quel était son style au juste mais préféra se concentrer sur le personnage de Charlotte Balinaud.

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