La vie à Akamasoa

31 mai 2011

L’heure de la récréation sonne à Akamasoa, le Père Pedro se lève et nous propose en souriant de l’accompagner dans l’immense cour. Les enfants accourent de partout en piaillant "Mon Père ! Mon Père ! Mon père !" En moins d’une minute, il est entouré de centaines de petits bras qui se tendent pour le saluer. Il serre les mains, caresse les têtes, un magnifique sourire aux lèvres. Le sourire d’un père sans doute devant tous ces petits sauvés de la décharge, de la misère, de l’alcoolisme, de l’illettrisme et pire encore. Ils sont là, heureux de vivre dans ce village coquet, aux jolies villas fleuries, aux écoles propres et claires, aux terrains de foot et de basket.

Restaurer l’espoir et la dignité

Plus loin, les femmes travaillent dans des ateliers de broderie, de vannerie, les hommes sont dans les carrières de granit, sur les chantiers des nouvelles écoles, des nouveaux logements, ils font de la menuiserie, ils sont agriculteurs.
Pour arriver là, ils ont d’abord été reçus et soignés dans un dispensaire, puis ils ont vécu dans une petite maison de bois, premier pas vers la dignité humaine, puis ils ont passé un contrat moral avec l’association : volonté ferme de refaire sérieusement sa vie ; respect des règles de vie sociale dans les villages ; travailler pour gagner de l’argent et gérer ses dépenses ; nourrir et scolariser les enfants. C’est à l’issue de ce processus qu’ils acquièrent une maison en dur et un travail !

L’urgence au quotidien

Aujourd’hui l’association du Père Pedro a 22 ans : pour la rentrée scolaire 2010-2011, 10 126 enfants sont scolarisés par l’association, de la crèche à la terminale ! On pourrait citer tant de chiffres qui montrent son extraordinaire réussite [1] mais il faut savoir que tout ceci demande une foi et une énergie hors du commun. Le Père Pedro est connu pour ses colères et ses indignations phénoménales quand quelqu’un, en face de lui, ne semble pas comprendre l’urgence permanente de sauver des vies. Certains le trouvent mal élevé et c’est vrai que rien ne l’arrête quand il s’agit de sauver un enfant. Et heureusement ! Il peut faire irruption dans un cocktail chic et demander de l’aide sans aucune crainte de casser l’ambiance. Il dit : "je suis de la lignée de Jésus qui a donné sa vie pour les plus pauvres. L’essentiel, c’est de savoir que l’amour de Dieu passe par l’amour des pauvres. Tout le reste, c’est du décor".

Au milieu des grappes d’enfants qui le fêtent, un tout petit garçon est agrippé à son doigt sans rien dire et le suit comme une ombre minuscule à côté du géant à l’accent argentin. Il nous sourit :"Il n’est avec nous que depuis quelques jours. On a mis du temps à le faire venir. Il a cinq ans environ et a vécu seul sur la décharge plusieurs années. Aussi, maintenant qu’il a compris qu’on ne le laissera pas, il ne me lâche plus."

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