TOURISME

Les enfants de l’Atlas

6 octobre 2020

L’amour. L’amitié. La joie. L’optimisme. Le rire. La force. La confiance. La fierté. Le bonheur ! Autant de mots simples qui résument l’éthique et la philosophie de l’association "Les Enfants Dar Bouidar" qui vient en aide aux enfants abandonnés. Située au Douar Derb Chemch, à quelques encablures de Tahanaout, c’est un beau village lové au pied de l’Atlas, à une trentaine de kilomètres de Marrakech.

Maisons aux façades en torchis ocre typiques à cette région parmi les plus pauvres du Maroc. Habitats colorés à l’atmosphère empreinte de bonheur, comme s’ils avaient été voulus et conçus à la manière de cette "demeure" immémoriale et propre à l’Humanité depuis que notre monde est monde que symbolise le ventre maternel.

Un combat humaniste

L’association a été fondée en 2011 par Hansjorg Huber, un entrepreneur d’origine suisse allemande, 73 ans aujourd’hui, qui a décidé en accord avec son épouse et ses trois fils, de consacrer la moitié de sa fortune acquise dans le courtage d’assurance, à redonner le sourire et un cadre de vie et d’éducation d’exception aux enfants abandonnés. Des enfants issus de viols ou de promesses de mariage non tenues, qu’une société encore sous le joug pesant de la religion et de traditions séculaires stigmatise et exclut de fait, jusqu’à leur dénier une quelconque reconnaissance juridique et sociétale.

Tabou sociétal

Des "non-êtres" que les statistiques officielles évaluent à 10.000 naissances chaque année, mais que Hansjorg Huber estime plutôt entre 30 et 40.000. Autant d’enfants dont la condition de paria, et l’opprobre populaire dont ils font l’objet, les marquent d’un sceau infâmant déjà dans le ventre de leurs mères. Des mères souvent très jeunes, issues des populations en situation d’extrême pauvreté, ayant été violentées, humiliées, rejetées, en proie à la peur et au cataclysme psychique permanents. Rappelons, en effet, que l’article 490 du code pénal marocain prévoit une peine de prison pour toute personne ayant eu des relations sexuelles hors mariage et un recours à l’avortement. Une disposition qui accroît d’autant plus la situation de ces nombreuses "mères célibataires" qui, pour le coup, se retrouvent sans aucune sorte de protection sociale. Rien d’étonnant, par là-même, qu’environ « 5000 enfants, selon la militante associative Aicha Chenna, sont annuellement abandonnés au Maroc, sans compter les nourrissons, au nombre de 24 quotidiennement jetés dans les poubelles !

L’éducation contre les préjugés

Avec ce premier village, inauguré le 17 avril 2015, 143 enfants - dont une dizaine atteints d’un handicap lourd - y sont actuellement accueillis et pris en charge par d’extraordinaires "mamans" de substitution et un personnel éducatif et soignant de tout premier ordre (au total 60 employés et une vingtaine de bénévoles). Le but poursuivi par Hansjorg Huber et ses collaborateurs : montrer et prouver par un système éducatif basé sur la résilience, l’amour, le respect, la tolérance, les valeurs philosophiques, culturelles et religieuses (une mosquée a même été construite à cette fin), l’enseignement de 4 langues (arabe classique, la darija marocaine, le français, l’anglais) la symbiose avec la nature, que ces enfants considérés comme la "lie" de la société marocaine peuvent en devenir les fers de lance et les symboles d’un renouveau.

Un financement 100% privé


Pour assurer au quotidien le fonctionnement de cette structure 100% privée, son initiateur a mis en place différentes sources de financement. Les maisons d’accueil sont ainsi sponsorisées par de grandes sociétés, dont les noms figurent sur des plaques apposées sur la façade de chacune d’elles. Un restaurant a également été mis en orbite où les visiteurs peuvent venir déjeuner moyennant une libre contribution. Des salles sont mises aussi à la location pour des entreprises et des particuliers désireux d’organiser des réunions, des « incentives », et autres évènements. En outre, grand collectionneur d’art devant l’Eternel, Hansjorg Huber a créé un espace-galerie où il met en vente la très grande majorité de ses œuvres (parmi lesquelles une pléthore de signatures prestigieuses), dont les bénéfices recueillis sont intégralement reversés dans les caisses du village.

Une foi à déplacer les montagnes !

"Le sort des enfants stigmatisés par la société est mon combat de tous les jours " dit celui qui, alors âgé de 22 ans, avait lu la souffrance et le désarroi dans les yeux des enfants réfugiés accueillis dans la Suisse de la fin des années 1960.
"Chaque enfant a besoin d’une personne de référence, responsable et digne de confiance" rappelle une des banderoles en forme de manifestes pour les droits des enfants qui se déploient sur tous les frontons des bâtiments du village. À voir tous ces magnifiques bambins, "oisillons" irradiants de babillages insouciants et joyeux, accourir et se précipiter dans les bras de cet homme au regard d’azur, petit par la taille mais géant par la force et la bonté qui émanent de sa frêle silhouette, pour le couvrir de bisous, on ne peut que se remémorer cet autre homme admirable qu’était l’Abbé Pierre. À contempler ces enfants saisir avec fougue le cou de ce "Juste parmi les Justes", on se dit que dans notre monde gangrené par les guerres et la violence, les miracles peuvent malgré tout exister !

Philippe Dayan

En savoir + : www.atlas-kinder.org/fr/

En raison de la Covid19, et des mesures de restriction dans les déplacements et les accès au village instaurés par l’état d’urgence sanitaire, une cagnotte a été mise en place pour aider l’association dans le paiement de ses charges. Celles et ceux qui souhaitent y apporter une contribution, aussi minime soit-elle, peuvent le faire via le lien suivant : https://www.cotizup.com/appel-a-laide-appel-au-secours

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