LIVRES

Le roman policier dans tous ses états

15 mai 2013

Le roman policier évolue avec les années et les amateurs se cantonnent souvent à quelques auteurs qu’ils connaissent bien pour ne pas être déçus, Et c’est prudent ! Petite promenade dans les rayons des librairies et dans nos souvenirs…

Arsenic et vieilles dentelles

Nous avons presque tous commencé par Les Dix Petits Nègres ou quelque autre succès de notre chère Agatha Christie. C’est toujours une énigme digne du Cluedo : Mademoiselle Rose dans le cellier avec un chandelier. Ou le colonel Moutarde dans la bibliothèque avec un pistolet. Non pas un Glock, un Browning sans doute comme dans Tintin. C’est une plongée dans un monde disparu, un Angleterre pleine de baronets et d’officiers dans l’Armée des Indes, de jolies femmes évanescentes gantées et chapeautées pour éviter les ardeurs du soleil et celles du voisin de train.
Autres portes d’entrée dans ce monde fascinant du crime, Sir Arthur Conan Doyle, auteur des formidables aventures de Sherlock Holmes qui peuvent devenir une vraie petite addiction, Maurice Leblanc et son “gentleman cambrioleurArsène Lupin, Gaston Leroux et Rouletabille, Simenon, le Belge que tous les Français ont adopté, moins tasse de thé, baise-main et brume sur la lande, plus miroton et pluie sur les écluses mais reconnu comme écrivain.

Séries noires

Les Américains n’étaient pas dans cette catégorie, trop violents, trop vulgaires. Raymond Chandler et Dashiell Hammett n’apparaissent que discrètement dans la Série Noire de Gallimard, en compagnie de deux Anglais qui se la jouent yankee, Peter Cheyney et James Hadley Chase, une collection pour ceux qui ne croient pas que dans la vraie vie, la police travaille comme Hercule Poirot  ! C’est le règne des femmes fatales, des appels téléphoniques dans la nuit, du sexe et du whisky qui font oublier la cruauté de la vie.
On ne peut pas ici parler de tous les auteurs que l’on a lus et aimés, Ed McBain, Chester Himes, Horace McCoy, James Cain et plus près de nous Michael Conolly, Harlan Coben, James Lee Burke et bien sûr tous les Scandinaves qui à la suite du Millenium de Stieg Larsson nous font doublement froid dans le dos. Henning Mankell qui, pour être sûr d’être débarrassé de Wallander, le rend malade d’Alzheimer, Arnaldur Indrason, Jo Nesbo, Jussi Adler-Olsen ils viennent des geysers d’Islande, des fjords de Norvège, des étendues glacées de Finlande ou de Scanie, leurs noms finissent souvent en –son, ils parlent beaucoup de protestantisme et d’extrême droite, on les adore.

A la tronçonneuse

Mais parallèlement, on note une sorte de dérive qui nous fait oublier le Dr Olive sur la terrasse pour nous envoyer des jets de sang artériel et des débris de cervelle à la figure.
Une des premières à nous retourner l’estomac avec des détails bien gore est sans doute Patricia Cornwell dont l’héroïne Kay Scarpetta est médecin légiste et passe une partie de son temps les mains dans des entrailles. Elle est d’ailleurs la mère spirituelle d’autres légistes, en particulier dans les séries télévisées. Là aussi, si les Experts restent assez mesurés et nous épargnent les visions plongeantes dans les abdomens, dans Body of Proof, le Dr Megan Hunt découpe les cœurs en fines tranches comme un tripier consciencieux et brandit toutes sortes d’organes avec jubilation. Quentin Tarentino est passé par là et les scènes de crimes sont de plus en plus sanguinolentes.

Sang, sperme et Cie

Ces derniers temps, nous avons lu deux romans, l’un de Jonathan Kellerman et l’autre de Cody McFadyen dont nous apprenons sur la jaquette qu’il a “atteint la perfection dès son premier roman”. Les deux présentent des meurtres avec éviscérations. Kellerman dans Victims reste suffisamment évasif pour que l’imagination ait sa place mais McFadyen, dans Shadowman nous décrit avec application le plus petit morceau de cervelle sur l’abat-jour, les sacs de plastique alignés avec les intestins à l’intérieur, les hurlements, les sodomies, les coups de couteau, les brûlures de cigarette, les égorgements et les murs repeints de sang et de sperme (merci le Luminol !). Il n’y a pas un crime mais toute une série auquel s’ajoute de la nécrophilie, de la violence sur animaux, sur enfants...
C’est quoi la prochaine étape ?

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