METIER

Journée de presse

16 septembre 2012

Dans la vie d’une –oui, il y a aussi quelques hommes mais si peu - journaliste d’ « art de vivre », celle qui s’occupe de déco, de tourisme, de mode, de cadeaux de Noël, il y a les « journées de présentations » durant lesquelles boutiques et bureaux de presse ouvrent leurs portes pour montrer les nouveautés. Jeudi 13 était l’une d’elles.

Idéalement il faut faire cette tournée avec une bonne copine, sinon c’est proche de l’insupportable : « Oh une nouvelle pompe à gougère ! Ravissant. » « Un saladier en zinc, drôlissime ! » « Une grelinette en cristal pour les bords de fenêtre, quelle belle idée ! » « Des recharges Nespresso pour se faire de l’eau pure ? Topissime. » Ne pas omettre les superlatifs, remplacer « bon » par « beau », ça fait esthète, et quand c’est hideux, on peut risquer un « Etonnant, non ? » à la Desproges, ici personne ne connaît et ça permet de pouffer in petto.

Silence on travaille !

Bref, on se retrouve au salon Récamier du Lutétia pour un premier RV avec les comités régionaux du tourisme. Là c’est sérieux, petites tables et discussion avec le représentants de chaque région. Il faut faire la queue pour la Bretagne, la Côte d’Azur, le Périgord, l’Alsace et beaucoup moins pour la Picardie et la Franche-Comté. Possibilité de jus de fruits et viennoiseries. Cool et on travaille.
Ensuite inauguration d’une boutique de chaussettes japonaises [1] : le must de la chaussette à orteils multicolores, anti-dérapante. Grand choix de mitaines pour pieds - on dit footsies - pour changer des immondes protège-bas caramel. Je reviendrai avec un cahier pour parler de la montée en puissance de la chaussette.

La rue Royale en majesté


Mais la vraie journée commence rue Royale : tous les porcelainiers et cristalliers attendent la presse. Avec Alessandra, nous commençons par JL Coquet, grande classe malgré un petit galop d’essai vers la clientèle du Golfe dans un coin sombre de la boutique. Au moment de sortir, je me retrouve devant une ex-consœur qui me détestait et comme elle fait semblant de ne pas me voir, je me précipite en roucoulant : « Adèle-Sophie ! Comment vas-tu ? ». Bises symboliques. Elle bafouille. Je la mitraille de questions sur ses enfants, son boulot, je n’écoute pas les réponses et disparais sur un « Ciao, ma belle ». La peste dit toujours « ma belle ».
Ensuite Bernardaud essaie de nous convaincre que tout ce qui sort de ses ateliers est génial. Non, non. Il y a du très très beau mais aussi du sans intérêt hors de prix, voir du très vilain comme ces assiettes « Portraits » couleur vomi. Nous repartons avec un dossier et un CD de photos.

Tu as vu le sac ?

Ces jours-là, les trottoirs appartiennent aux journalistes qui entrent et sortent de chaque boutique avec un grand sac et quelque chose dedans. Un cadeau ! Plus qu’une journée de présentation, il s’agit d’une chasse au trésor : « Tu as vu le sac Hédiard ? ». Oui, je l’ai vu, grand, avec ses rayures noires et rouges emblématiques. Bon, on ira faire un saut, histoire de récupérer une boite de thé ou un pot de confiture.
Autrefois, quand on ne savait rien de Fitch, Moody’s et Standard & Poor’s, nous repartions de chaque maison avec un sac en papier siglé contenant un dossier de presse et un petit cadeau. Mais un petit cadeau Baccarat, Lalique ou Fauchon c’était formidable ! Certaines gâtaient leur famille et leurs amis, les autres, moins délicates, revendaient. Et cela se fait toujours, allez sur E-bay. Avec le temps, les cadeaux sont devenus de plus en plus petits avant de disparaître chez certains. Lalique a ouvert le bal : plus de cadeau et un grand sac vide avec le dossier que l’attachée de presse qui se la jouait grande dame nous glissait d’un air complice. C’est sûr qu’emporter ses affaires de gym dans un sac orange vif à liseré marron Hermès, c’est plus chic que dans un sac Monop’ mais pas autant qu’une babiole en cristal givré.

La Marquise du Crazy

En remontant vers la Madeleine, nous allons chez Christofle, la présentation est toujours belle et le buffet ressemble à quelque chose. Ou alors nous commençons à avoir faim. Fromages d’ici et d’ailleurs, petits légumes, jambon chiffonné, risotto à se rouler par terre : la gourmandise est la deuxième motivation de cette course effrénée ! Je rencontre une autre ex-consœur mais elle est beaucoup plus futée qu’Adèle-Sophie et elle m’inonde aussi de compliments idiots jusqu’à l’asphyxie. Nous continuons et, en passant devant Villeroy & Boch, la typique petite grande maison.

La blonde à l’entrée ne nous (re)connaît pas et nous jette le regard que l’on réserve généralement au truc nauséabond qui dépasse de la poubelle. Elle nous met dans les mains d’une assistante qui fait un barrage de son corps pour limiter les risques d’invasion. On commence par des plats blancs, plutôt pas mal et puis elle nous montre des tasses à thé, blanches aussi. Soudain son regard morne se met à briller à la vue de la même tasse avec du doré çà et là. Plutôt inutile. J’entends vaguement « partenariat… Dombasle… blason ». Dombasle comme Arielle ? Ou comme en Meurthe-et-Moselle ? Elle pointe un gros tas d’armoiries sur la tasse, surmontées de ce qui ressemble à une couronne de marquis. C’est Dombasle-sur-Meurthe, commune de Lorraine, mais en quel honneur ? Elle m’explique lentement que ce sont les armoiries d’Arielle Dombasle, si, si ! D’ailleurs il y a ses initiales sur la sous-tasse - évitez « soucoupe » dans ces milieux, ça fait ringard -. Le blason d’Arielle Dombasle, marquise ? Une cucaracha de gueule flanquée de strings d’argent et de plumes d’autruche de sinople ? Je commence à rire : « Il faut être très groupie, non ? ».
Non, et on nous reconduit à la porte. Nous n’avons même pas vu le buffet !

[1Tabio, 32, rue Saint-Sulpice

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