Par le bout du nez…

31 octobre 2011

Les nez se recrutent souvent dans les familles de parfumeurs, ou à Grasse. Parfois dans les familles de parfumeurs grassois ! Aliénor Massenet n’est ni fille de nez, ni grassoise. Elle se souvient qu’elle agaçait sa maman car elle reniflait tous ses aliments avant de les porter à sa bouche « comme un petit chien » . Elle a encore l’odeur de la peau de ses bras de petite fille de 8 ans, chauffée par le soleil. Plus tard, les trajets en métro sont l’occasion de reconnaître les parfums portés par les voyageuses : Samsara, Poison, Eternity…

Les années de formation

« Cancre » à l’école parce que dyslexique, Aliénor Massenet fait un premier stage à 16 ans chez Firmenich [2] et découvre qu’elle peut sans doute vivre de sa passion. Tout comme un musicien fait ses gammes, elle va tous les vendredis à Compiègne apprendre et pratiquer avec Monique Schlienger, professeur d’olfaction à l’ISIPCA [3] et fondatrice de la société Cinquième Sens, dédiée au monde du parfum.
Le parcours d’Aliénor Massenet est intéressant car elle a tout appris sur le tas : en 1995, elle entre à l’IFF de New York et travaille avec de grands professionnels comme Sophie Grojsman, le Picasso de la parfumerie selon elle, à qui l’on doit Trésor de Lancôme et qui lui a enseigné la formulation, et Pïerre Warghye, avec lequel elle collabore pour Intuition for men, d’Estée Lauder. Aujourd’hui, après sept ans aux Etats-Unis et trois enfants, elle est chez IFF à Paris et n’arrête plus de créer.

Après les gammes, les symphonies

L’une de ses dernières créations est l’époustouflante eau de parfum Parlez-moi d’Amour, de John Galliano qui, malheureusement, est sorti après les déclarations intempestives du couturier. Quel gâchis ! Le jus révèle d’abord la douceur d’une framboise piquée de mandarine, puis c’est un bouquet de rose et de jasmin avec une pointe de lavande sur un lit de vétiver, patchouli et vanille. Quant au flacon, il est parfait, une lettre d’amour avec son timbre.

Les inspirations d’Aliénor Massenet sont volatiles comme les essences qu’elle manipule : des bribes de conversations surprises ici ou là lui semble manquer d’un parfum pour que la scène soit complète. Elle travaille aussi beaucoup d’après des spectacles qu’elle voit, et d’après des matières premières qui la font rêver.

A côté de senteurs pour de grandes marques prestigieuses comme son Trésor in love de Lancôme, un énorme succès, elle s’offre le luxe de faire Shams, pour Memo [4], un luxueux parfum de niche à base de poivre et de oud [5] Elle a aussi réalisé Néroli pour Chloé et… Dazzling Darling pour Kylie Minogue. En tout, une vingtaine de parfums en dix ans.

La puissance de l’olfaction

Et quand cette jolie Aliénor cesse de humer et d’inventer, elle est bénévole au CEW [6]. Elle part avec sa petite malette pleine d’odeurs et fait travailler leur mémoire aux patients. Et l’odeur d’amande déclenche toujours les souvenirs de colle blanche et d’école !

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