Une ONG dans la ville

13 mars 2012

Les enfants entrent dans la grande salle de la CAF du XIII. Ils ne sont pas bien grands mais ont déjà une assurance de futurs collégiens. Ou celle de terreurs de primaire. Plus de garçons que de filles, des petits garçons aux yeux plein de malice et aux jambes pleines de fourmillement. Les filles semblent plus calmes mais c’est peut-être leur coquetterie de futures femmes qui leur donne cette attitude pondérée. Elles portent des petits bijoux, des barrettes et des chouchoux mais c’est l’une d’elles, et pas un garçon, qui pouffera en soufflant à sa voisine : « Hi hi hi ! Une journaliste c’est comme une sorcière ! »

Ici, l’association humanitaire Maison de Sagesse (MDS) vient aider les enfants en difficulté scolaire à combler leur retard. La CAF du XIII les accueille dans ses locaux. MDS avait commencé par s’occuper des lycéens et des collégiens et finalement devant les besoins, l’association a ouvert une section pour les primaires. Ce coin du XIII a ceci de particulier qu’il est le seul de Paris intra-muros à présenter les mêmes caractéristiques que la banlieue. Les enfants viennent chercher ici un cadre de travail : ils viennent le plus souvent de familles nombreuses africaines ou maghrébines qui vivent dans les tours avoisinantes avec des parents qui ne maitrisent souvent que mal le français. En revanche, pas un petit Asiatique, malgré la proximité relative du quartier chinois.

Après un goûter fourni par l’association, ils s’installent par petits groupes, deux ou trois enfants pour un adulte à des tables séparées pour faire les devoirs. On est frappé par l’extrême gentillesse et l’infinie patience des bénévoles que rien ne semble décourager même pas les virevoltes des uns et des autres. Bruits de chaises, chutes, fous rires, glapissements « il m’a volé mon crayon ». Arnaud P., le responsable, se charge de la « police » : « non Ahmé, n’embêtes pas Nesrine ! ». « Assieds toi ! Non pas sur le dossier, correctement sur ta chaise ». Jean-Eric, étudiant en biophysique essaie d’inculquer quelques rudiments de calcul à Bill et Mohammed. Bakary, spécialiste du français et des maths, a emmené quelques trublions dans la pièce d’à côté pour calmer le jeu. Christine est la seule enseignante pur jus et elle ne se laisse pas troubler par ces micro-séducteurs qui tentent de l’attendrir « non pas ce soir, je n’ai pas envie de travailler ». Un enfant pâle aux sourcils froncés a l’air de réfléchir à l’équilibre du monde tandis qu’un autre, âgé de 10 ans en CP, ne sait toujours ni lire, ni écrire et crache par terre comme un dur…

Les parents versent une cotisation symbolique, entre 8 € et 10 € par mois, mais les listes d’attente sont longues car la crise est passée par là. Arnaud parle de ces mères qui le supplient : « Prenez mon enfant, je ne sais pas comment l’aider, j’ai peur qu’il ne traine dans la rue ».
Les besoins sont immenses et certains enfants ont eu jusqu’à 15 enseignants différents en CM2 !

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