ENVIRONNEMENT

L’uranium au Niger (2)

12 février 2012

Suite de notre enquête sur l’indépendance énergétique toute relative de la France avec les problèmes causés par les mines d’uranium aux habitants de cette région située au nord du Niger.

Tout d’abord il faut rappeler que la pollution dont nous avons parlé la semaine dernière [1] touche particulièrement les populations nomades qui la subissent parfois comme ouvriers mais surtout comme éleveurs : les barbelés autour des mines empêchent la libre circulation de leurs troupeaux, abreuvés à l’eau radioactive, et il n’est pas question de les dédommager puisqu’ils sont « nomades », donc pas propriétaires fonciers ! A Imouraren, l’hypothétique mine d’Areva où tout est gelé pour l’instant, on a bouclé un immense périmètre avec des clôtures qui interdisent les déplacements du bétail et diminuent l’étendue des pâturages une année où les récoltes sont si mauvaises que l’on prévoit un pic de crise alimentaire pour mars. Et personne n’a songé à rouvrir les barrières en attendant…

Uranium contre cure salée

Le gisement d’Azelik, dans la plaine d’Irazer, exploité par les Chinois est tout aussi potentiellement dangereux : la mine se trouve sur un territoire favorable à la « cure salée », événement très important dans la vie des éleveurs Peuls et Touaregs. Voici ce qu’en raconte le site www.agadez-niger.com :
A la fin de la saison des pluies... Les éleveurs guident leurs troupeaux à travers de nombreux pâturages dans une transhumance de 300 à 400 km pendant 2 à 3 mois. Au cours de ce périple, à la mi-septembre, tous les troupeaux convergent vers la ville d’Ingall (au nord) pour se réunir dans les pâturages riches en sel de la plaine de l’Irazer. Il est en effet essentiel pour le bétail - chèvres, moutons, vaches et dromadaires - de compléter l’herbe fraîche par des apports en sel minéraux. Cette grande réunion est l’occasion pour les éleveurs de satisfaire les besoins des animaux mais aussi de célébrer la grande fête annuelle de la cure salée. Pendant trois jours, on célèbre des mariages, on fait des concours de danses, des courses de dromadaires et l’installation de cette mine chinoise au mépris des traditions est très grave.
Dans l’espoir de détourner les nomades du terrain où se trouve la mine, le gouvernement essaie de concentrer la « cure salée » sur Ingall, en faire une sorte de Luna-Park pour touristes, un Touaregland sponsorisé par Coca-Cola et censé célébrer la cohésion sociale au Niger.
Et comme à Arlit et Imouraren, personne ne songe aux pertes économiques subies par les nomades puisqu’ils n’ont aucun titre foncier.

Un cocktail explosif

Il est facile de comprendre combien un tel cocktail de troupeaux mal en point, de famine annoncée et d’indifférence des compagnies minières est explosif ! Et n’ayons garde d’oublier qu’il reste six otages détenus quelque part dans ces étendues inhospitalières, des otages dont on ne parle que rarement mais qui ont été kidnappés il y dix huit mois environ. Souvenons nous aussi que des Touaregs ont servi dans l’armée de Kadhafi et sont revenus de Libye avec des armes lourdes, près à en découdre avec les armées nationales du Mali et du Niger. Face aux attaques récentes de Touaregs au Mali, des déserteurs de l’armée malienne se sont réfugiés au Niger où le risque de contagion de guerre civile se précise. Pour la première fois à Bamako, il y a eu des pillages de boutiques de commerçants maures et les Blancs (Maures ou Touaregs) fuient Bamako. Plusieurs milliers de Maliens se sont réfugiés dans trois pays, le Niger, la Mauritanie et le Burkina Faso [2].
Henri de Raincourt, ministre de la Coopération, vient de se rendre au Niger, au Mali et en Mauritanie, pour recommander des solutions négociées et aussi pour démentir fermement que la France appuie la rébellion car l’affrontement prend une tournure raciale très inquiétante. Certains au Mali accusent les "Blancs" français d’être solidaires avec les "Blancs" sahariens (Arabes, Maures et Touaregs).

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