87 Alex a disparu

14 septembre 2011

Le lendemain, Beaudoin reprit l’escalier qui montait à l’enclave féminine du groupe. A son entrée aux Boutiques, il nota que Ginette s’était installé sur le sous-fesse fleuri de Lucile et que la photo d’un persan avait remplacé Schéhérazade, le gouttière au panier de lézard gris. Il vit l’œil interrogateur se fixer sur lui dans le rétroviseur géant et une immense lassitude le prit. Il jeta un regard circulaire et aperçut Laetitia de Neuville, Marie Bouillot et Vanessa Schmidt. Claudine, la jolie secrétaire qui revenait à ce moment-là les bras chargés de courrier, le salua d’un

"Bonjour inspecteur" qui lui remit un peu de baume au cœur.
“Bonjour, Claudine, comment allez-vous ?”
Elle sourit en haussant ses épaules minces et leva les yeux aux ciel :
“Comme d’habitude… Qu’est-ce qui nous vaut le plaisir de votre visite ?”
“La fin de l’enquête.”

Elles vinrent toutes, de la Cuisine, de la Santé, des People et des Gadgets avec Jeanne Riguidel et ses cheveux acajou au premier rang comme une maitresse d’école.
“Alors, inspecteur, qu’avez vous appris sur la mort de cette infortunée Madame Lannois ?”
Pour les générations futures, on ne parlerait plus de Lucile mais de "cette infortunée Madame Lannois". C’était digne et émouvant et dans la bouche emmiellée de Riguidel, presque beau. Il raconta brièvement que la malheureuse avait été tué par un jardinier, exaspéré par ses exigences.
“Un fou, alors ?”
“Un pauvre garçon, un peu simple.”
“Vous l’avez coffré, j’imagine ?
“Non, non. Il est quelque part entre la Nouvelle-Ecosse et le Saint-Laurent mais Interpol s’en occupe.”

Apparemment soulagées d’apprendre que le monstre serait bientôt sous les verrous, elles retournèrent à leurs bureaux. Ginette Brons fila à ce qu’elle pensait être sa nouvelle place et Jeanne Riguidel lança :
“Maintenant, on va pouvoir s’occuper sérieusement de la reprise en main de cette rubrique qui en a bien besoin.”

Et Ginette se tassa dans le fauteuil tournant.
Laetitia, toujours en faux Chanel, demanda alors :
“Inspecteur, vous êtes au courant pour Alex ?”
“Au courant de quoi ?”
Elle gloussa d’aise, en battant de ses paupières turquoise.
“Elle est partie. Avec des indemnités. Elle a réussi à se faire virer, sans que personne ne le sache, ni Jeanne, ni Lucile, ni Ginette.”
“Depuis quand était-elle au courant qu’elle avait gagné ?”
“Longtemps, je crois. Avant sa scène avec Lucile.”
Il se sentit curieusement bafoué de n’avoir rien su de ses intentions et repartit dans le froid de la rue du Caire où les clandestins déchargeaient des cotonnades fleuries des camions. Il erra autour de la Bourse, d’un passage à l’autre, pour finir galerie Véro-Dodat. Il y avait si peu de temps qu’il était venu là avec Alex et pourtant tout avait changé. Sauf Alex qui était restée aussi indéchiffrable qu’au premier jour.

Les jours passèrent sans qu’elle ne donne signe de vie et Vogel finit par lui suggérer de prendre son vendredi pour avoir un long week-end de repos.

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