MODE

Mini-miss ou mini-pouf ?

18 août 2011


Quelle curieuse époque celle qui consiste à éliminer les femmes des photos de mode pour les remplacer par des gamines de plus en plus jeunes ! Cette fois ce sont les Américains qui tiquent devant des photos de Thylane, 10 ans, fille de l’ex-animatrice Véronika Loubry et d’un ex-footballeur... Bien sûr, c’est plus facile pour les photographes ! Bien sûr, les petites filles sont de plus en plus précoces ! Bien sûr, il faut faire rêver ! Et les femmes ne font plus rêver ? Bizarre...

Si vous voulez faire rire une rédactrice de mode, c’est-à-dire une de celles qui mettent en scène les photos de mode de vos magazines féminins, parlez-lui des « mini-miss » américaines. Si elle ne rit pas, c’est qu’elle est horrifiée par ce que l’on fait subir à ces petites filles que l’on déguise, que l’on torture, tout ça pour faire plaisir à une mère qui n’est pas heureuse dans son bled de l’Idaho ou du Wisconsin. Et elle se réfère à l’excellent Little Miss Sunshine. Si elle s’en souvient, elle évoque même le meurtre horrible d’une mini-miss de Boulder dans le Colorado en 1996.

Et ensuite, elle prépare sa séquence photo et choisit comme mannequin une gamine de 10 ou 12 ans qui sera peut-être la nouvelle Kate Moss.

Cherchez l’erreur ! Dans les deux cas on déguise des enfants en femme, on les sexualise en les maquillant et en les parant comme des adultes… Les premières sont pathétiques et les secondes vont faire des couvertures et des affiches pour les plus grandes maisons de luxe.

Les unes comme les autres sont poussées par les plus terribles imprésarios qui soit, les parents bien sûr qui espèrent on-ne-sait-quoi. Une pincée de poussière d’étoiles sur une vie banale ? De l’argent comme la famille Culkin en son temps ?

La différence est dans le choix du modèle. Ces pitoyables mini-miss sont des réductions de Doris Day ou Ginger Rogers : choucroute, bouclettes, casque de laque, faux-cils, vaporeux froufrous, numéros de claquettes et sourires imputrescibles, parfois tenus en place par une sorte de râteau inséré dans les joues, pour éviter les crampes aux zygomatiques. Elles renvoient à l’Amérique des années 1950 de Norman Rockwell tandis que nos Lolitas ont pour icône Kate Moss justement, l’éternelle prépubère qui fait vendre tout et n’importe quoi du moment que c’est du luxe.
Bien sûr, il est plus flatteur, du moins à Paris, de se projeter dans une image de transgression soft à la Moss que dans celle de Sarah Palin et autre agitée de la Bible Belt !

Corollaire de cette évolution, en dehors de l’évidente incitation à la pédophilie, on jette les femmes. Trop grosses, trop moches, trop vieilles. Trop femmes. Merci Karl Lagerfeld et les autres. Mais le plus anti-femme n’est pas celui que l’on croit, au contraire. C’est le plus sympa avec ses choix d’Yvette Horner et de Beth Dittopour présenter ses modèles. Il a été au bout de son radicalisme en inventant une mariée de défilé "garçon".
Autrefois, les Noirs étaient représentés au cinéma par des Blancs passés au cirage comme Al Jolson, exemple même du racisme asphyxiant qui a régné à Hollywood jusqu’à Sidney Poitier à la fin des années 60… Merci donc Jean-Paul Gaultier pour cette innovation qui nous renvoie à l’aube du féminisme. Du coup, on se pose la question : Yvette et Beth, c’était juste pour se moquer ?

MOTS-CLES :
Bookmark and Share flux RSS


form pet message commentaire
Qui êtes-vous ?