18 Quand baisent les hérissons...

6 mars 2011


Vogel dévisagea la journaliste avec surprise.
“Comment savez-vous cela ? Nous n’en avons parlé à personne.”
“Mais si bien sûr, c’est la première chose que m’a dite Ginette Brons et cela m’a fait rire.”
“Nous avons parlé de hérissons en agate, c’est tout ! Pas de hérissons qui baisent.”
“Oui, d’accord, mais c’était bien eux, non ?”

Elle ne semblait pas se rendre compte qu’elle avait fait une gaffe et qu’il allait d’autant moins la lâcher qu’elle l’horripilait .
“Oui, mais comment le savez-vous ? Il n’y a que la police, M. Lannois et le meurtrier qui soient au courant.”
Elle écarquilla les yeux d’un air soudain incrédule :
“Vous n’avez pas l’intention de m’accuser de ce meurtre tout de même ?”
Si, il en avait l’intention. Il avait l’intention de lui clouer le bec, de lui faire peur. Il était fatigué du papier glacé, des Parisiennes qui ne prennent rien au sérieux, qui parlent de hérissons qui “baisent”. Il ne connaissait de la place Vendôme que les parkings et deux ou trois vitrines mais ici, il avait le pouvoir et elle allait s’en rendre compte.
“Vous vous rendez compte de la gravité de ce que vous m’avez dit ?”

Le sourire de la jeune femme disparut comme un rideau qui tombe. On aurait dit que le soleil s’était couché et il se demanda s’il avait eu raison. A partir de cet instant, elle ne desserra les lèvres que pour articuler “si vous le dites” en haussant les épaules, les yeux rivés au linoleum façon marbre du sol. Au bout d’une demi-heure, il lui demanda de l’attendre dans un bureau voisin, encore plus décontenancé qu’il n’avait été agacé. Elle alla s’installer dans un fauteuil de moleskine, sortit un livre de sa poche et se mit à lire.
Il appela le journal et finit par tomber sur Beaudoin.
“Tu as fini avec ces dames ?”
“Non, c‘est sans fin. Cette rubrique a un nombre de collaboratrices incroyable et toutes plus haineuses les unes que les autres : j’ai vu Vanessa Schmidt, elle déteste encore plus Alex Lombard qu’elle ne détestait Lucile. Elle en crève de ne pas être sûre de la remplacer à la tête de la rubrique. Adeline Bertoud a aussi les dents plantées dans la moquette, mais elle, c’est Ginette Brons qui la rend malade, l’idée que ce “petit pot de moutarde” puisse devenir chef la fait vomir. Il y a encore Laetitia Quelque chose, Marie Truc et je suis sûr que j’en oublie.”
“Laisse tomber ! Lombard est là et je suis dans une impasse. Cela se passerait peut-être mieux avec toi.”
“Tu as besoin de ma sophistication parisienne...”, ironisa le jeune inspecteur.
“Admettons. Arrive.”

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