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Le polar qui vient du froid…
22 février 2011
Si vous en êtes resté à Dennis Lehane, Ed McBain, Michael Connelly et tous les autres qui nous parlent de sociopathes et serial killers made in USA, il est temps de vous mettre à jour. Aujourd’hui le polar se concocte au pays des Krisprolls.
Du Dalhia Noir aux Orchidées pour Miss Blandish, des vrais Américains aux Britanniques masqués, les meurtres se sont longtemps écrits en anglais. On a vu les femmes s’y mettre, pas la peine de remonter à Agatha Christie, il y a les Patricia Highsmith, Barbara Vine, P.D. James, Mary Higgins Clark, Donna Leone et bien sûr Patricia Cornwell, la plus flamboyante. On a tout acheté ou emprunté à la bibliothèque la plus proche. On a vécu avec Scarpetta et Bosch, avec Steve Carella et Philip Marlowe, avec le commissario Brunetti et Alex Delaware…
Et Stieg Larsson vint. Il a démodé New York et L.A., Quantico fait sourire et Venise a sombré dans la lagune. Ce qui se vend, c’est des noms impossibles à prononcer avec des « ø », des histoires qui se passent dans des régions inconnues, à la différence de la Californie qui, même si nous n’y avons jamais mis les pieds, nous est devenue totalement familière. Les polars qui se vendent le mieux ont de curieux noms, une couverture noire cernée de rouge avec une image en médaillon représentant une petite fille de préférence hydrocéphale et/ou perverse, genre Mercredi Adams qui s’amuse à arracher les pattes des mouches et les donner à manger à sa tatie végétarienne : La fille qui rêvait d’un bidon d’essence et d’une allumette est un bel exemple.
Bizarrement, le premier du cycle Millenium s’appelle en français Les hommes qui n’aimaient pas les femmes et en anglais The Girl with the Dragon Tattoo [1]. Bref, on s’embarque tous pour les plaines battues par les vents de Scandinavie. On croise des pervers, des psychopathes, des néo-nazis et on a affreusement peur. Heureusement le bon journaliste est là (oui, tout le monde ne s’appelle pas Jean-Luc Mélenchon), Mikael Blomkvist, et surtout la petite hackeuse géniale, Lisbeth Salander, avec son Asperger qui nous donne tous envie d’être pirate informatique et vaguement autiste.
Autre gros succès venu des alentours du cercle polaire, les romans d’Henning Mankell avec Wallander en improbable héros fatigué, diabétique, fils, père et mari plus qu’approximatif. Une sorte de grosse bête bourrue rendue à la perfection par Kenneth Brannagh dans un beau rôle semi-muet. Dommage il a troqué la vieille Peugeot à la Columbo des romans pour une Volvo. Les histoires toujours très compliquées se passent en Scanie, dont personne n’avait jamais entendu parlé jusqu’ici. Ce doit être non loin du Danemark parce que les héros passent leur temps à se rendre à Copenhague. Sa chef ressemble à Edith Cresson, non ce n’est pas une série glamour. On croise des pervers, des psychopathes, des néo-nazis et on a affreusement peur.
Donc, si vous voulez faire éditer votre polar qui se passe entre Volontaires et Félix Faure, avec pour héros Jean-Pierre Dubois et Adèle Flandrin, il va falloir regarder ce qui se passe chez Actes Sud et signer Lars, Knutt, Gunnar, Kjell, Arni ou Leiff. En Grande Bretagne, Random House a publié Jo Nesbo, présenté comme le prochain Stieg Larsson. Blue Door, une section de Harper Collins s’apprête à sortir The Hypnotist de Lars Kepler, pseudonyme de deux auteurs suédois…
[1] La fille au tatouage en forme de dragon
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