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La grève des magistrats

7 février 2011


On ne sait pas d’où vient cette animosité mais, une chose est claire, Nicolas Sarkozy n’aime pas les magistrats. Il les accuse de ne pas faire leur travail, il les compare à des petits pois sans saveur alignés dans une cosse… étrange pour un avocat, non ? Ou alors, ceci explique cela et il y a une vieille rancœur que quelques séances sur un divan couvert d’un kilim d’Anatolie ne pourraient qu’arranger.

En attendant, les magistrats sont furieux. Et exaspérés, et frustrés, et découragés. « On est tous obligés de faire des choix et on nous les reproche ». Les exemples ne manquent pas : « Normalement, on doit tenir nos séances d’assistance éducative avec nos greffiers. Si on ne le fait pas, c’est une faute disciplinaire. Sauf que si on les fait venir, notre greffe se retrouve en sous effectif, les greffiers ne peuvent remplir leur tâche, on bloque la machine et c’est une faute disciplinaire », explique Françoise, juge pour enfants dans le sud-ouest.
Et le problème est partout le même, il y a sous effectif dans toutes les fonctions : « Quoi que l’on fasse, on est mauvais » ajoute-t-elle.

Visiblement l’affaire de Nantes a remis du sel sur les plaies et tous s’identifient à ces magistrats qui ont fait ce qu’ils pouvaient. Isabelle plaisante : « La société nous demande d’être magiques  : nous devons réparer les victimes et éliminer tout caractère dangereux chez les gens que l’on juge. Or, nous avons seulement les outils nécessaires à accomplir ce pourquoi la justice pénale est faite : sanctionner au nom de la société pour éviter la justice privée. » Non, il n’y a pas de baguette magique cachée dans les robes des magistrats.

Un autre raconte le tribunal de Grande Instance de Caen : « un bureau sur deux est interdit parce qu’il est étayé. On n’a pas le droit de boire aux robinets tant les canalisations sont vétustes et empoisonnent l’eau. Interdit aussi d’ouvrir les fenêtres : elles tombent à la moindre tentative… »

Incompréhension, sous-effectif, misère… « A Nantes, il aurait fallu faire quoi ? Tony Meilhon avait exécuté sa peine et l’histoire de viol était particulière puisque c’était des représailles contre un pointeur. Nous ne sommes pas dans Minority Report, on n’enferme pas les gens préventivement pour les empêcher de nuire dans le futur… ».

Et tous de rappeler quelques chiffres qui font mal  : la France est 39e sur les 43 pays du Conseil de l’Europe, pour le nombre de fonctionnaires de justice pour 100 000 habitants. Derrière l’Arménie et la Géorgie. Elle compte 9,1 magistrats pour 100 000 habitants contre une moyenne de 20,6 et le recrutement est en baisse.
« Aujourd’hui, c’est Nantes, demain, c’est nous ». Voici pourquoi ils ne vont assurer que les urgences et les affaires les plus délicates.
A suivre.

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