SOCIETE

Très chers agents immobiliers…

7 mai 2020

Philomène Ladanse est de retour avec sa connaissance parfaite de l’immobilier et son alacrité… Aujourd’hui, elle nous parle de ces officines qui s’installent partout, dès qu’un commerce ferme. Massage chinois ou agence immobilière ?

Très chers agents immobiliers… valez-vous vraiment ce que vous coûtez ?
Au risque de discriminer, impossible dorénavant de se le cacher : certains métiers sont plus utiles que d’autres. Alors, pourquoi tant de disproportion entre service rendu et rétribution perçue ?

Salaire de cadre moyen

A questions jamais posées, réponses jamais données. Il est temps de se lancer et de se demander comment le succès a pu monter à la tête des intermédiaires immobiliers au point de les persuader que s’ils sont si généreusement rétribués, c’est « Parce qu’ils le valent bien. Point. »
La prolifération des agences immobilières dans les rues de nos métropoles ne peut avoir échappé à quiconque. Mais quelle en est la raison ? La réponse passe par une autre question : faire visiter un bien cinq ou six fois - ou même dix ou vingt - à des acquéreurs potentiels, transmettre quelques renseignements glanés auprès du propriétaire puis faire signer un formulaire imprimé aux deux parties mérite-t-il de se voir octroyer le salaire annuel d’un cadre moyen ? Clairement, la réponse est non.

Faible bagage et bon bagout

Et pourtant, un faible bagage assorti d’un peu de bagout permet de se lancer dans la profession avec l’espoir de gains substantiels. Espoir souvent comblé : les taux de commissionnement sont restés pratiquement les mêmes depuis 20 ans alors que les prix ont été multipliés par deux, trois ou plus. Sur le même bien qui valait 200 000 € au début du siècle et qui en vaut maintenant 600 000, l’agent immobilier a vu sa commission passer de 12 000 à 36 000 €. De quoi s’offrir de rutilantes vitrines arborant des panneaux aux photos aussi prometteuses que les descriptifs qui les accompagnent. Du "somptueux duplex avec vaste terrasse " à la "ravissante studette agencée par architecte" en passant par le "produit d’investissement à forte rentabilité et gros travaux à prévoir" … La photo est moins attirante malgré le grand angle ! Mais les annonces sont formelles, il y a forcément un bien pour chacun.

Commissions ou honoraires ?

Mais une fois franchi le seuil de l’agence pour en savoir plus, surprise : une fois sur deux, le bien qui a attiré l’attention du chaland est “sous offre”, “sous compromis”, voire, a déjà changé de propriétaire. Autrement dit, chaque agence parvient, avec seulement trois ou quatre affaires - soit une ou deux ventes par mois ou par trimestre selon sa taille - à prospérer et même, à essaimer. Les confortables commissions - que les fédérations professionnelles préfèrent qualifier du terme plus noble d’“honoraires” - permettent ainsi aux agences de se multiplier. Alors que, moins nombreuses, chacune pourrait parfaitement proposer quatre à cinq fois plus de biens. Sans avoir à travailler plus pour gagner plus. Tout en pratiquant des niveaux de rétribution beaucoup plus supportables pour la clientèle !

Boîtage et démarchage

Pour s’en convaincre, il suffit d’ouvrir sa boîte aux lettres : on y trouve pêle-mêle des tracts et prospectus en provenance de toutes les agences du quartier. Offrant toutes le même service : une estimation gratuite de votre bien. Il faut savoir que l’occupation principale des négociateurs est le “boîtage”. Lequel consiste à encombrer les boîtes aux lettres des immeubles tout en espérant parvenir, ce faisant, à nouer la conversation avec un ou deux occupants pour s’enquérir de la présence dans le bâtiment de biens à la vente. Ou, mieux, à prendre langue avec le gardien auquel il promettra une enveloppe aussi généreuse que nette d’impôt en cas d’aboutissement. Autre exercice incontournable : scruter les annonces des particuliers puis les appeler pour tenter de leur extorquer un mandat. Quitte à déployer des arguments confinant à l’intimidation : “Vendre sans agence, vous n’y pensez pas, la loi est si compliquée, vous ne vous en sortirez pas…”. Autant pour le législateur qui, en légiférant, pensait protéger le citoyen désarmé : il le jette dans les griffes du lion.

Suite la semaine prochaine

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