49 Pilule, gélule et capsule...

19 mai 2011

Elle sortit du sac Fnac une sorte de classeur ni très beau, ni très neuf avec la même défiance que s’il s’était agi d’une bombe à retardement. Beaudoin résista à l’envie de plonger pour s’en emparer.
“Ensuite, il est parti dans un discours très compliqué sur le passé de certains qui n’était pas ce que l’on croyait, sur son travail et sa ténacité qui lui avaient permis de passer de journaliste de base à homme de confiance d’un patron de presse, sur le plaisir que cela ferait à quelques uns qu’il disparaisse lui et ses documents et qu’il ne se laisserait pas intimider comme ça.”
“C’était quoi "ça" ?”
“Je pense qu’il faisait allusion au meurtre de Lucile. Il est persuadé qu’on l’a tuée à cause de lui.”
“Et vous ?”
Elle s’emporta tout à coup :
“Mais je ne pense rien. Vous me faites rire : j’ai peur c’est tout. D’abord elle, ensuite moi peut-être.”
“Beaucoup de gens connaissent votre existence dans la vie de Louis Lannois ?”
“Je n’en sais rien et puis je ne suis pas vraiment dans sa vie. Je n’ai rien demandé.”

Vogel reporta son attention sur le dossier qu’il lui tardait d’examiner aussi.
“Après vous avoir confié ce porte-document, qu’a fait Lannois ?”
Aude fouilla ses poches et en sortit un mouchoir en papier déjà détrempé. Elle se mit à le triturer en reniflant. Elle cherchait comment raconter la suite mais ne trouvait pas les mots qui convenaient pour un souvenir aussi embarrassant à défaut d’être douloureux. Beaudoin tenta de l’aider :
“Vous avez ouvert ce dossier ? M. Lannois vous en a parlé plus précisément ?”
Elle hocha la tête désespérément, incapable d’articuler un mot.
“Vous aimeriez un verre d’eau ?” se hasarda-t-il à proposer.
Elle le regarda fixement et ses larmes se remirent à couler librement alors qu’elle se lançait.


“C’est quand il a voulu un verre d’eau... En cherchant à m’expliquer ses histoires, il s’est énervé encore plus et s’est mis à souffrir en se tenant la poitrine. Il était violet. J’ai demandé s’il n’avait pas des comprimés ou quelque chose. Il m’a indiqué du doigt la salle de bain et a parlé de capsules vertes et blanches. C’était la première fois que j’entrais dans cette pièce. Il y en avait partout des capsules, des gélules, des cachets, des pilules, des médicaments, de toutes les couleurs, de toutes les formes. J’en ai pris des vertes et blanches que je lui ai apportées. J’aurais voulu qu’il me dise si c’était les bonnes. Il m’a juste fait signe qu’il voulait de l’eau, il était très, très congestionné. Je suis allée au lavabo, il a avalé les médicaments et s’est écroulé. J’ai été prise de terreur, surtout que j’entendais la femme de ménage dans la cuisine. Je me suis dit qu’elle allait penser que... enfin je suis partie avec le porte-document avant qu’elle ne nous trouve.”

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