Pages glacées

Et si on renouait avec une tradition journalistique ancienne ?

Si on conjugait pour rire, internet et feuilleton, dont chaque épisode se termine par "Aaah ! Mon Dieu !", "Non, pas ça !", "Toi ? Aaargh !"
C’est l’idée pour 2011 : un roman policier palpitant, dans le monde de la presse avec meurtre ignominieux.
Voici donc Pages Glacées pour les lecteurs du Monde comme il va : luxe, ragots et cruauté.
Trois fois par semaine.

  • 70 On se fait une petite vidéo ?

    Vogel eut toutes les peines du monde à joindre l’illustre Jean-Charles Balinaud. Une secrétaire à la voix aigre commença à lui expliquer que M. Balinaud était un homme très occupé, qu’il était en conférence de rédaction, puis qu’il avait un rendez-vous et que ce serait très difficile de l’avoir en ligne à quelque moment que ce soit.
    “Passez-le moi, c’est tout ce que je vous demande. Il jugera de lui-même s’il est important ou non qu’il me rencontre.”
    “Mais je ne peux décemment pas l’interrompre en pleine (...)

  • 71 Coup de blues

    Beaudoin eut beaucoup de mal à retrouver une expression plus ou moins sereine pour revenir au bureau. Bêtement, il avait envie de se faire porter pâle, quelque chose de bien puéril comme se mettre sous sa couette en prétendant avoir attrapé froid. Froid comment ? Froid dans les escaliers déserts des immeubles du Sentier. On pouvait dire qu’elle, au moins, ne manquait pas de sang-froid. Femme vertueuse certes mais pas affolée. Il n’avait pas compris sur le moment son murmure. Elle était là, (...)

  • 72 Chacun doit payer sa dette

    Il s’arrêta pour juger de l’effet de ses paroles. Devant leur silence poli, il continua :
    “D’une certaine façon, je l’aimais bien.”
    Beaudoin imagina aussitôt Alex répétant ironiquement "d’une certaine façon, en effet !" et surprit dans le regard de Vogel quelque chose du même ordre. Comme Balinaud semblait avoir fait le tour de ce qu’il voulait dire, il fallut insister un peu :
    “C’est-à-dire ? Vous l’aimiez assez pour aller la rejoindre à la campagne.”
    “Ce n’est pas ça.”
    “Vous n’alliez pas partager ces (...)

  • 73 La pute de Mr Hyde

    “Vous ne savez peut-être pas que c’est lui qui l’a déflorée puis initiée à toutes ses perversions. Elle aurait dû n’être qu’une petite provinciale à qui on fait des bébés. Une femme de pharmacien. Mais le futur académicien avait des pulsions incompatibles avec la vie qu’il se préparait. Il garda sa femme et ses enfants pour son image et Lucile pour le reste. Cette grosse fille maladroite est devenue la pute de Mr Hyde, l’esclave sexuelle d’un pervers de sous-préfecture qui attendait de monter à Paris. En (...)

  • 74 Un peu de douceur...

    “J’ai eu des petits problèmes avec la justice. Dans une banque. Rien de grave mais il vaut mieux que cela reste dans l’ombre surtout avec les gens que je suis amené à fréquenter pour le journal,” finit par souffler Balinaud.
    Vogel fit un signe d’assentiment vague, comme s’il était au courant et après avoir rappelé à Balinaud qu’il devait rester dans les parages, il le laissa partir avec un soulagement évident. Puis s’adressant à Beaudoin, il conclut :
    “La journée a été longue, non ? Il faut digérer tout (...)

  • 75 Livraison à domicile

    Finalement, il ne laissa pas son amaryllis pour une pauvre clocharde que tant de beauté aurait émerveillé, il l’emporta dans son studio où il se mit en devoir de réfléchir posément à la situation. D’abord, le meurtre : il n’en pouvait plus. Balinaud avait ajouté une touche dans l’horreur générale. Ce type le révulsait et même s’il n’était en rien responsable de cette histoire de ligature de trompes, cela allait bien avec le reste de son abjecte personnalité. Lannois était un vieux dégueulasse sans moralité. (...)

  • 76 Aimez-vous Mozart ?

    Rabroué comme un gamin, il s’exécuta et commença à grimper les étages à pied. Parvenu au palier du cinquième, il entendit de la musique à travers la porte laquée bleu outremer et resta figé, sans oser faire un pas de plus ni appuyer sur la sonnette. Il se sentait pris en flagrant délit d’indiscrétion. C’était comme s’il surprenait un pan de sa vie où il n’avait rien à faire. Cet opéra qui filtrait légèrement dans l’escalier lui faisait le même effet que s’il l’avait surpris dans son bain. S’il sonnait, ce (...)

  • 77 Mangrove, lagune et eaux troubles

    “Monsieur, commença Vogel, nous voudrions vous épargner une trop grande fatigue mais nous enquêtons sur un affaire compliquée qui nous a mené jusqu’à Jean-Charles Balinaud. Je ne pense pas qu’il ait grand-chose à voir dedans mais nous aimerions connaitre son passé puisqu’il jouit d’une réputation un peu trouble dans son journal.”
    Petitrichard semblait s’amuser énormément :
    “Une réputation de quoi ? A part de partouzard, de pédophile, de... quoi d’autre encore ? C’est un garçon parfait. J’ai dû le mettre dans (...)

  • 78 Gay tropiques

    Hermine arriva avec une carafe de jus de fruits et des verres qu’elle posa sur la table basse à côté de son père.
    “Tu as soif ma chérie ?” lui demanda-t-il.
    Elle regarda les deux hommes en battant des cils, les yeux incroyablement verts dans un visage semé de taches de rousseur. Elle était le plus détonnant cocktail qui puisse se concevoir et ils comprenaient l’émerveillement du vieil homme devant cette adorable poupée qui était l’ultime cadeau de sa vie.
    “C’est pour vous que Maman a pressé des (...)

  • 79 Puits d’amour

    Il ne fut guère difficile de se faire confirmer le lendemain par Alice Macloux que son mari avait bien raccompagné Balinaud à l’avion de Libreville et qu’il avait raconté son histoire à son honorable beau-père. Elle ne comprenait pas comment cette histoire ancienne pouvait avoir un intérêt aujourd’hui mais elle ne savait pas que son père vivait très bien d’histoires anciennes.
    Arrivés à ce point, ni Vogel, ni Beaudoin ne voyaient ce que ces révélations apportaient de plus à leur enquête sur Lucile (...)

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