AIR DU TEMPS

Ne tirez pas sur la loco !

24 janvier 2011


Curieux de se souvenir qu’il n’y a pas si longtemps, c’est-à-dire une petite poignée d’années, la SNCF avait une réputation d’exactitude égale à celle d’un coucou suisse ! Et brusquement, sans que l’on y prenne garde, ce sont les contrôleurs ébahis, qui annoncent quand d’aventure, cela se produit : « Aujourd’hui, notre train arrive à l’heure prévue ».

On a beaucoup parlé du « train de l’enfer » , le désormais célèbre Strasbourg-Port-Bou, des Eurostar coincés en rase campagne, des TGV pris dans la glace qui leur remonte dans les bronches, mais que sait-on des TER, des Aqualys, des Teoz, de ces trains obscurs qui relient Bourges à Vierzon ? Pour les usagers, c’est tous les jours l’enfer et, pour eux, pas la moindre indemnisation à l’horizon ! Pas assez chic et médiatisable !

Attention train à l’heure !

Petite enquête chez les voyageurs de l’Aqualys, le nom inventé par des experts de la com pour le Paris-Orléans : « Comme les rames sont en mauvais état, on voyage parfois dans le noir », explique Alain. « Sans chauffage », ajoute son voisin. Il semble qu’Orléans ne soit plus du tout à une heure de Paris : les employeurs parisiens ne s’y trompent pas et n’engagent plus les Orléanais en raison des retards incessants. Jean-François évoque son record, 4h : « En hiver, c’est la faute à la neige. En été, c’est le soleil qui dilate les rails. Au printemps, des animaux se baladent sur les voies et à l’automne, ce sont les feuilles mortes ».

« En fait, il est devenu exceptionnel d’avoir le train que l’on veut, à l’heure prévue, et qui nous mène jusqu’au bout ». En effet, il arrive que, sans prévenir personne, le train qui devait aller jusqu’à Orléans s’arrête aux Aubrais et de là, tout est possible. Une navette quand tout va bien, même s’il faut emprunter des souterrains et des escaliers, bien pensés pour les fauteuils roulants et les poussettes d’enfants, ou rien du tout. « Je me suis retrouvée avec mon bébé dans sa poussette, lâchée aux Aubrais sans aucune explication et obligée de prendre le tram. Comme c’est tout un train qui cherche à rejoindre le centre, il faut en attendre plusieurs. » s’agace Joanie tandis que son mari lui rappelle « la fois où ils nous ont laissés à Bibliothèque-François-Mitterrand au lieu de gare d’Austerlitz ». Toujours sans un mot d’explication. Les anecdotes fusent : « Parfois il n’y a pas de première classe. Et parfois pas de seconde classe. Dans les deux cas, ceux qui ont payé leur billet de première font plutôt la gueule ».

Les WC ? Hors service

Tout semble d’une fantaisie et d’une improvisation totale : « Le train est annoncé en gare d’Austerlitz, on monte une demi-heure à l’avance et 5mn avant le départ on nous dit qu’il n’y a pas de locomotive ou on nous sort une phrase sibylline genre « il faut faire les freins » ». Parfois, en plus de la locomotive, on doit attendre que le contrôleur et/ou le conducteur arrivent par un train, en retard lui aussi, ou en taxi !
Sans parler des curieuses « grèves de confort » qui frappent tous les week-ends. Confort pour qui ?

Anne qui fait Orléans-Bourges tous les jours, a également bien aimé les feuilles mortes qui l’ont bloquée au milieu de nulle part, après de longues journées de travail ! Très problématique également la question des WC : « J’ai vu une mère faire faire pipi à sa petite fille entre deux wagons parce que les toilettes étaient hors service », se souvient Rodolphe. Et Anne raconte : « On a changé les toilettes du TER. Finis les gouffres ouverts sur les cailloux et les traverses. Maintenant, ce sont des WC chimiques qui se bouchent et qui gèlent l’hiver. L’an dernier, il est arrivé que le train reliant Tours à Lyon-Perrache ne dispose d’aucun WC utilisable pour tout le trajet ! Et le contrôleur a fait cette annonce surréaliste : « Les voyageurs qui auront besoin de se rendre aux toilettes sont priés de se signaler au contrôleur ». Vous avez dit bizarre ?

Un peu de douceur dans un monde de brutes

Pourtant, Anne garde son humour :" Mais la vie des "pendulaires", comme on nous appelle, a de bons côtés : nous avons fait connaissance entre habitués. On squatte les wagons et on réserve les places. Le matin, on se fait des petits dej et le soir parfois on organise des pots. C’est ainsi qu’on peut trouver un petit groupe qui débouche le champagne au milieu d’un train bondé. Ceux qui veulent dormir le peuvent car on va les prévenir quand ils devront descendre. Sympa non ? Mais pas au point de nous faire prendre avec le sourire l’annonce ravie de Nathalie Kosciusko-Morizet d’une augmentation de seulement 2% du prix des billets ."

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